La Rhune à Sare

  La Rhune à Sare
 

Philippe Veyrin (Lyon 1900 – Urrugne 1962)
 

Huile sur toile
 

H. 54 cm, L. 73,5 cm
 

Vers 1940 ?
 

Inv. 87.17.1
 

Salle 10

 

Les flancs de la Rhune, rosis par les lueurs dorées du couchant, dominent un paysage vallonné au creux duquel se serrent deux petites fermes labourdines. Le mur d’une bergerie en moellons de grés rose se profile au premier plan, mais nulle trace de vie humaine ou animale dans ce tableau qui pourtant semble habité. Nous sommes à Sare, dans les premières décennies du 20e s., et Philippe Veyrin fixe sur la toile, avec justesse et délicatesse, la sérénité de l’instant.
Orphelin issu d’une famille protestante lyonnaise, Philippe Veyrin grandit à Urrugne, confié à une demoiselle qui prend soin de sa santé fragile – il souffre d’un lourd handicap physique – et lui assure une éducation solide.
Parmi ces souvenirs d’enfance, il évoque les contes et les légendes basques qui laissèrent dans son jeune esprit une empreinte profonde et déterminèrent son existence vouée à l’étude et à la célébration du pays qui l’avait adopté. Dans un article de la revue Gure Herria paru en 1959[1], il se souvient des promenades en compagnie de l’historien érudit Joseph Nogaret, et de ses neveux dont il est l’ami, prétextes à de « merveilleuses évocations du passé ». Des contes qu’il rapporte, il retient par exemple celui-ci : «Planant sur son manche à balai, la sorcière qui avait été brûlée vive sur la dénonciation d’une petite fille, descendait d’un seul bond de la Rhune à la grève de Hendaye »…
Devenu adulte, Philippe Veyrin se consacre entièrement aux études basques, guidé par ses amis érudits ou artistes. Il est l’auteur de la première synthèse historique et ethnographique consacrée aux trois provinces du nord des Pyrénées, Les Basques, parue en 1943 et devenue un classique de la littérature régionale.


[1] Veyrin, Ph. (1959).  Souvenirs sur le commandant Boissel et la création du Musée Basque. Bayonne : Gure herria, 1, p. 4

 

Pour nourrir cette intense activité d’écriture et de recherche – il collabore à de nombreuses revues et figure parmi les fondateurs du Musée Basque - il parcourt le Labourd et la Basse-Navarre, séduit par les paysages qu’il découvre et sensible à la richesse ornementale des arts populaires. Sans formation artistique, il utilise très tôt crayons et pinceaux pour réaliser des croquis au fil de ses excursions : dessins gouachés sur papier couleur ou illustrations à l’encre de chine. Il vient progressivement à la peinture à l’huile, jusqu’à faire partie du Groupe des 9, artistes réunis à Ciboure autour de Charles Colin et Ramiro Arrue. Ce dernier, qui fut son ami, l’a souvent accompagné dans ses promenades à la recherche du motif et Philippe Veyrin a sans nul doute mis à profit ses conseils avisés pour perfectionner et affiner sa technique. Peintre paysagiste, il est habile à saisir un effet de lumière, une impression fugitive, qu’il traduit en quelques touches colorées déposées sur la toile, à la brosse ou au couteau. Pour traduire la douceur éphémère du crépuscule - ou peut-être celle d’une aube d’automne ? - le pinceau de Philippe Veyrin se fait ici léger, les teintes sont subtiles et nuancées, les reliefs moelleux. La Rhune, montagne mythique des Basques parsemée de dolmens et de cercles de pierre, enveloppe d’une ombre apaisante la campagne alentour.